Déficit foncier et succession : que devient l’avantage fiscal en cas d’héritage ?

Illustration d’un professionnel analysant un réseau numérique symbolisant la gestion patrimoniale, la succession et les avantages fiscaux liés au déficit foncier

Le déficit foncier est un levier fiscal prisé des propriétaires bailleurs pour réduire leur impôt grâce aux travaux et charges déductibles liés à la location. Mais que se passe-t-il lorsque le propriétaire décède avant d’avoir profité pleinement de cet avantage ?

 

 

Qu’est-ce que le déficit foncier ?

Le déficit foncier est un mécanisme fiscal qui permet aux propriétaires bailleurs de réduire leur impôt. Il est mis en place lorsque les revenus locatifs sont inférieurs aux charges déductibles supportées par le propriétaire.

Lorsque le résultat est négatif, ce déficit peut être imputé sur le revenu global du propriétaire, dans la limite de 10 700 euros par an (hors intérêts d’emprunt), l’excédent étant reportable sur les revenus fonciers des dix années suivantes.

Ce dispositif impose certaines conditions :

  • le bien doit être loué nu et soumis au régime réel d’imposition,
  • les dépenses doivent être effectivement payées et justifiées,
  • la location doit être maintenue pendant au moins trois ans après l’imputation du déficit sur le revenu global.

Ce mécanisme constitue un outil d’optimisation fiscale reconnu pour les investisseurs immobiliers souhaitant valoriser un patrimoine locatif tout en réduisant la pression fiscale.

À lire également : Les principaux dispositifs de défiscalisation immobilière à connaître

 

 

Décès et succession : que dit la loi ?

Le décès d’un propriétaire bailleur met fin à sa personnalité fiscale et transfère ses biens à ses héritiers.

 

Le décès met fin à la personnalité fiscale du défunt

D’un point de vue fiscal, le décès met un terme à la personnalité du contribuable. Cela signifie que les droits et obligations fiscales cessent à la date du décès, y compris ceux liés au déficit foncier.

L’administration fiscale établit une déclaration finale qui couvre la période du 1er janvier jusqu’au jour du décès. Les déficits fonciers constatés sur cette période peuvent être imputés sur ces revenus une dernière fois, mais ne sont pas transmissibles aux héritiers. Le déficit foncier est considéré comme un avantage personnel, attaché au bailleur lui-même, et non au bien immobilier.

 

Le traitement fiscal du bien immobilier transmis

Après le décès, les héritiers deviennent propriétaires du bien et repartent à zéro :

  • les revenus fonciers postérieurs leur sont imposables ;
  • les anciens déficits du défunt sont perdus ;
  • les engagements locatifs (loi Pinel, Denormandie, loi Malraux, etc.) doivent être vérifiés au cas par cas.

Le bien est intégré à la succession selon sa valeur vénale au jour du décès, servant de base au calcul des droits de succession.

 

Le rôle du conjoint survivant et des héritiers

Si le conjoint survivant possédait déjà le bien en commun (régime matrimonial, indivision, SCI), il conserve sa part et continue à déclarer les revenus fonciers correspondants.

En revanche, la part du défunt suit les règles de la succession : elle revient à ses héritiers, qui deviennent copropriétaires indivis du bien ou associés dans la société le détenant.

Par exemple : si le bien était détenu à parts égales (50/50), le conjoint survivant conserve sa moitié et reste imposé sur les revenus correspondants, tandis que la moitié appartenant au défunt est transmise à ses héritiers.

À lire également : Déficit foncier et zone tendue : quelles différences pour les investisseurs ?

 

 

Déficit foncier et succession : exemples concrets

Pour mieux comprendre les conséquences de ces règles, voyons comment le déficit foncier est traité selon les différentes situations.

 

Le décès intervient avant l’imputation du déficit

Lorsqu’un propriétaire décède avant d’avoir imputé son déficit foncier, l’avantage fiscal n’a pas encore produit d’effet sur son imposition. Dans ce cas, le déficit peut être utilisé une dernière fois dans la déclaration finale du défunt, pour réduire son revenu global ou ses revenus fonciers de l’année en cours.

Exemple :

Alexandre, propriétaire d’un appartement loué nu, a réalisé d’importants travaux en 2024, générant un déficit foncier de 15 000 €. Il décède en 2025 avant d’avoir utilisé ce déficit. La totalité du déficit peut donc être déduite dans sa déclaration finale de 2025, pour réduire ses revenus de cette année.

 

Le décès intervient après une imputation partielle

Si le propriétaire a déjà imputé une partie de son déficit foncier sur ses revenus antérieurs, seule la fraction déjà utilisée aura produit un effet fiscal. Le report restant devient caduc à la date du décès.

Exemple :

Alexandre a généré un déficit foncier total de 20 000 € en 2023. Il en a imputé 10 700 € sur son revenu de 2023 (déclaration faite en 2024). Il décède début 2025 : les 9 300 € restants ne peuvent plus être utilisés, ni par la succession ni par son conjoint survivant.

 

Le bien transmis en indivision ou vendu après le décès

Lorsque le bien à l’origine du déficit foncier est transmis en indivision ou vendu après le décès, les héritiers deviennent propriétaires indivis et déclarent les revenus fonciers à leur nom. Ils repartent toutefois sur une base fiscale neuve, sans pouvoir reprendre les déficits du défunt.

En cas de vente, le déficit passé n’a aucun impact sur la plus-value immobilière, qui se calcule entre la valeur vénale du bien au jour du décès (nouveau prix d’acquisition) et le prix de cession. Les travaux réalisés peuvent toutefois majorer cette valeur d’acquisition, à condition qu’ils soient justifiés et qu’ils n’aient pas déjà été déduits fiscalement. Autrement dit, on ne peut pas profiter deux fois du même montant ! Soit les travaux ont été déduits des revenus fonciers, soit ils viennent majorer la valeur du bien pour le calcul de la plus-value.

Exemple :

Alexandre avait réalisé 80 000 € de travaux en 2023, générant un déficit foncier de 20 000 €, dont 10 700 € seulement avaient été déduits. Il décède début 2025. Ses deux fils héritent du bien, évalué à 450 000 € au jour du décès, puis le vendent 480 000 € en 2026.

La plus-value imposable est donc de 30 000 € (480 000 € – 450 000 €). Le déficit foncier restant (9 300 €) ne peut ni être imputé sur leurs revenus ni réduire cette plus-value : ils repartent d’une situation fiscale neutre, comme s’ils avaient acquis le bien à la date du décès.

 

 

Anticiper pour protéger ses héritiers

Face aux limites du déficit foncier en cas de décès, il est essentiel d’anticiper la transmission du patrimoine immobilier pour éviter la perte d’avantages fiscaux et simplifier la succession.

 

Structurer la détention du patrimoine immobilier

La détention du patrimoine au travers d’une société civile immobilière (SCI) offre une continuité plus souple : les parts sociales sont transmises aux héritiers, tandis que la société continue d’exister. Les revenus et charges demeurent imputables à la SCI, évitant ainsi toute rupture fiscale brutale.

 

Utiliser le démembrement de propriété

Le démembrement permet au propriétaire de transmettre la nue-propriété du bien à ses héritiers tout en conservant l’usufruit, c’est-à-dire le droit de percevoir les loyers et de supporter les charges.

Ce mécanisme permet de réduire les droits de succession à payer et d’organiser la transmission du patrimoine sans interrompre la gestion locative. Ainsi, l’usufruitier continue à gérer les revenus fonciers et à déclarer les charges, tandis que les héritiers deviennent propriétaires à terme, une fois l’usufruit éteint.

 

S’entourer de conseils spécialisés

Pour optimiser la succession, il est fortement recommandé de consulter :

  • un notaire, pour sécuriser la structure juridique et la rédaction des clauses successorales,
  • un conseiller en gestion de patrimoine, pour ajuster la stratégie fiscale et patrimoniale (choix du régime matrimonial, SCI, démembrement, assurance-vie…),
  • un expert-comptable, pour suivre la cohérence entre la gestion locative et la fiscalité déclarée.

Anticiper la question du déficit foncier dans une succession, c’est préparer l’avenir de son patrimoine et offrir à ses héritiers une transmission claire et optimisée.

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